l’immunité selon l’ayurvéda

On appelle immunité la capacité de l’organisme à prévenir la maladie, et plus généralement les déséquilibres, et à y répondre. L’immunité est une réponse complexe de l’organisme impliquant de nombreux systèmes et fonctions : méfiez-vous donc des super compléments qui « boostent » l’immunité sans que vous ne changiez quoi que ce soit à votre mode de vie ou à votre alimentation…

Selon l’ayurvéda, notre immunité dépend de plusieurs facteurs :

  • Baala : la force, la résistance inhérente à chaque individu.  C’est notre capacité de résilience face au stress sous toutes ses formes (ex : changements, transports, aléas climatiques, émotions, situations frustrantes…). Il y a deux sortes de baala : l’une est innée, elle est liée à la constitution (Kapha a le plus de baala, Vata a le moins de baala, Pitta est entre les deux). La seconde forme de baala est modifiable par le style de vie et l’alimentation, elle peut être renforcée par l’équilibre des doshas.
  • Ojas : l’essence primordiale subtile qui soutient la résistance de l’individu, ojas est la force vitale, le rayonnement. C’est le produit ultime, raffiné, de la digestion, issu du métabolisme des 7 tissus : rasa/la lymphe, rakta/le sang, mamsa/les muscles, meda/le tissu adipeux, asthi/les os et articulations, majja/le système nerveux, shukra/le tissu reproducteur. Comme pour baala, nous avons deux formes d’ojas : une forme innée et une forme acquise, modifiable par nos habitudes de vie et par la phytothérapie.
  • Agni : l’activité enzymatique, la capacité de défense de l’organisme. Nous avons trois formes d’agni : l’agni primaire dans le duodédum et l’estomac, l’agni secondaire dans le foie, et l’agni tertiaire au niveau cellulaire. Tout pathogène entrant dans le corps doit traverser la barrière enzymatique de l’agni primaire pour entrer dans le sang, son rôle est donc fondamental dans l’immunité. Il est entièrement modifiable par l’hygiène de vie et l’alimentation. Lorsque l’agni est faible, on assiste à la formation d’ama, c’est-à-dire de toxines dans les tissus produites par une digestion imparfaite. La présence d’ama est à l’origine de la grande majorité des maladies, notamment les maladies dégénératives.

Pour améliorer son immunité, l’ayurvéda recommande :

1°) Eliminer l’ama s’il y en a. Et si vous avez des troubles digestifs, vous avez forcément de l’ama. Parmi les symptômes de toxicité (présence d’ama), on peut citer : les douleurs musculaires et articulaires, la fatigue chronique, les maux de tête, la mauvaise haleine, les problèmes de peau… L’un des principaux objectif de la cure ayurvédique, au printemps et à l’automne, est la détox, c’est-à-dire l’élimination de l’ama présent dans le système digestif et les tissus profonds.

2°) Equilibrer les doshas (Vata, Pitta, Kapha) en excès : il ne s’agit pas ici de votre constitution, qui ne change pas au cours de la vie, mais plutôt de «vikriti », c’est-à-dire de l’état actuel de vos doshas. Cela peut être l’un des doshas de votre constitution qui est « aggravé », ou bien un autre (cela peut être une combinaison de plusieurs doshas). Une consultation et un suivi en Ayurvéda vous aide à mettre en place les bonnes habitudes pour vous, à ce moment de votre vie, et à long terme.

3°) Equilibrer l’agni : en travaillant sur la digestion. Certains mélanges d’épices permettent de renforcer l’agni, certaines routines ayurvédiques le régularisent… Il est difficile de déterminer seul(e) l’état de son agni, votre praticien en ayurvéda peut vous guider.

4°) Développer ojas. Tous les chemins semblent mener à la digestion, puisque l’ojas acquis est le produit ultime de la digestion, il est issu du métabolisme des 7 tissus. En effet, chaque tissu se nourrit lui-même, puis transmet le substrat nutritif pour le tissu suivant dans la chaîne.

Dans la vision biochimique (médecine occidentale), l’élément clé de la défense immunitaire, les globules blancs, est produit au niveau de la moelle osseuse (majja). L’ayurvéda approuve, cependant la performance de majja est conditionnée par la capacité de digestion cellulaire au niveau de chacun des tissus précédents. Si l’un des maillons (tissus) est défectueux, alors majja, puis shukra, seront défectueux, et la production d’ojas sera limitée.

Concrètement : que faire pour améliorer son immunité ?

1°) L’exercice physique

Le premier maillon de la chaîne des tissus est Rasa, la lymphe. Le système lymphatique ne dispose pas d’un système de pompage (à l’inverse du système sanguin, avec le cœur). Le mouvement de la lymphe est entièrement dépendant de l’activité musculaire, c’est elle qui lui permet de circuler. Si l’on manque d’exercice physique, alors la lymphe ne parvient pas à transporter les nutriments, on crée une congestion, une stagnation. Les tissus ne se forment pas correctement, et une sensation de faim accrue se manifeste alors que le corps réclame les nutriments qui ne sont pas parvenus aux cellules.

Toutes les constitutions ont besoin d’au moins une heure par jour d’exercice physique. Les Vata iront vers des activités douces (yoga, marche…), les Pitta des activités calmantes (natation, jogging en plein air sans performance…), les Kapha des activités vigoureuses (aérobie, sport collectif, squash…). Au-delà de votre constitution, il faut surtout tenir compte de l’état actuel des doshas ou vikriti. Par exemple, si vous êtes dans l’âge du Vata (plus de 55 ans), alors les activités Vata sont préférables.

2°) L’élimination des déchets

L’évacuation quotidienne des selles est une préoccupation fondamentale pour l’ayurvéda. Pour aider chacun à parvenir à l’élimination idéale (taille et consistance d’une banane mûre, le matin à jeûn), voici quelques conseils généraux, valables pour tous. Cependant, le problème de constipation peut être beaucoup plus complexe, et nécessiter un rééquilibrage plus vaste (système endocrinien, par exemple).

  • Boire une tasse d’eau chaude le matin à jeûn.
  • Prendre une cuillérée à café d’huile (olive, sésame…) au coucher, avec une demie-tasse d’eau chaude (pour les selles dures).
  • Consommer 1 cuillérée à soupe par jour de graines de lin moulues.
  • A chaque repas, prendre dans un peu d’eau chaude ½ cuillérée à café d’un mélange d’épices digestives (deepana), par exemple cumin-coriandre-fenouil-curcuma-cannelle-gingembre.
  • Calmer Vata par un auto-massage de tout le corps à l’huile de sésame tiède. Masser le ventre avec un mouvement circulaire, dans le sens des aiguilles d’une montre. On peut aussi masser le ventre avec de l’huile de ricin, pour aider l’évacuation.

L’hydrothérapie du colon, telle qu’elle est pratiquée en occident, est considérée comme un facteur d’aggravation du Vata (donc à éviter, sauf dans les cas extrêmes et urgents, où l’on doit détoxifier au plus vite, car la vie est menacée). En revanche, les praticiens ayurvédiques peuvent faire, avec la préparation adéquate, des enemas thérapeutiques : introduction dans le colon de petits volumes d’huile, puis de décoction de plantes (volume inférieur à 500 ml).

3°) La respiration

Une respiration profonde, complète, à chaque moment de la journée, est incontestablement l’un des piliers de la santé. Profitez de la pratique de yoga pour éduquer votre système, mais aussi des marches silencieuses dans la nature. Les pranayamas classiques sont toujours recommandés : kapalabhati et respiration alternée.

4°) Les aliments qui développent ojas

Certains aliments ont une affinité particulière avec shukra, le 7ème tissu, et permettent spécifiquement de le nourrir et de le développer, permettant ainsi le développement de l’ojas, qui est le sous-produit de la digestion cellulaire au niveau de shukra.

Mais attention, cette nutrition ne peut fonctionner que si l’on a l’agni (capacité digestive) suffisant. C’est pourquoi il est essentiel de consommer ces aliments régulièrement (au quotidien), à long terme, mais à petites doses. Par exemple, une portion d’amandes (trempées, pelées) comprend 5 à 7 amandes seulement. Pour le miel, on recommande 1 c à c par jour, et pour le ghee entre 1 et 3 c à c selon la capacité digestive. De fortes doses, au quotidien, de ces aliments hautement nutritifs, causeraient une congestion, une aggravation de kapha, et des déséquilibres sérieux comme la prise de poids et la formation d’ama.

Noix, amandes, noisettes… fraîches et trempées pendant 4 heures minimum (peler les amandes

Lait cru, bouillir et refroidir

Miel frais et local

Ghee maison

Céréales intégrales fraîchement moulues

6°) L’utilisation appropriée du mental et des sens

En tant que discipline holistique, l’ayurvéda reconnaît les liens entre le corps, le mental et l’esprit. Elle est particulièrement vigilante à l’utilisation que nous faisons de nos cinq sens, qui sont les ponts entre ces différentes dimensions de notre être.

Ainsi, pour préserver notre immunité et nous renforcer, il est essentiel de se ménager des moments, au quotidien, pour :

  • Se protéger des distractions. Par exemple, avoir des plages horaires sans écrans, c’est-à-dire des moments fixes dans la journée sans ordinateur, télévision, tablette, téléphone…
  • Pratyahara, l’une des pratiques clés du yoga, consiste à retirer les sens des stimuli extérieurs, vers notre monde intérieur. C’est la préparation à la méditation.
  • Reposer nos sens : écouter de la musique douce et relaxante, ou encore le silence, qui est devenu un luxe, placer des cotons imbibés d’eau de rose sur nos yeux clos, confortablement installé sur un lit ferme ou un tapis de yoga moelleux… Relaxer véritablement. Lire, c’est bien aussi, mais cela ne repose ni le mental, ni tous les sens.

« Bougez le corps, faites circuler le souffle, éliminez les déchets », proverbe ayurvédique